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Nous nuit !

Publié le par Mathias LEH

Nous nuit !

Les larmes coulaient

Tu ne sais pas

L’émotion à tuer car c’est toujours de trop.

 

Je t’ai rencontré dans une soirée bête à crever, j’étais venu pour faire plaisir à une amie, j’étais seul à regarder les autres danser, je n’osais pas, je n’ose jamais.

Tu tournais dans des rythmes de musiques répétitives, je te voyais, je t’en voulais sourdement de cette si belle insouciance. J’évitais de t’observer trop franchement, l’insouciance comme arme suprême. Pourtant, ainsi, je devinais que tu me savais là, je ne voulais pas le croire.

 

Quand ça mord, ça coule

A quoi sert toute venue ?

Tout est perdu.

 

Tu es venue, légère de sous-entendus, ce ne pouvait être pour moi… Je regardais autour de moi. J’ai aimé être ainsi pris dans ton étau. Tu ne laissais pas le choix. Nous avons bu, nous avons parlé, nous sommes retrouvés une clope à la main sur une terrasse dans le frais de la nuit. Je ne voulais rien de plus. Juste content mais ce léger frisson de te décevoir et de perdre aussitôt ton attention.

 

Le bouillon

Les heures et la chaleur, noire

Le goût. Tu regardes.

 

Tu posais parfois ta main sur moi, je faisais comme si cela n’avait pas d’importance, tu la laissais traîner, restait posée sur moi, sur quelques onces d’épiderme.

Je ne sais pas ce qui m’a pris, ce fut le premier déclic, j’ai pris ta main, je suis allé danser, c’était une musique entêtante et répétitive, un balancement incessant, j’avais soudain l’impression d’être seul, même toi n’étais plus là.

Je laissais tout mon corps tanguer, je n’avais pas envie de toi, j’ai si rarement vraiment envie de quelqu’un, en fait !

 

Quand je suis tombé, la première fois

Il faisait tellement noir en moi

J’ai évité la honte et les remords

J’ai pris la tangente.

 

J’ai bu, j’ai fumé, tu me regardais, tes yeux brillaient de plus en plus, des étincelles, tu n’étais pas belle, c’était autre chose, un charme terrible. Tu étais en vie, d’une incandescence folle.

Je ne connais pas le nom que l’on peut donner à ce qui germait, je ne peux pas dire, je ne sais toujours pas, j’évite les connotations, je ne savais pas du tout où nous irions, je ne pensais presque rien de nous. Je te voyais toi, j’étais papillon nuit attiré par ta lumière. Je dansais dans les volutes d’une douce folie. Je me délectais du nectar de ta voix, l’éclat de ton sourire et ton rire flûté. Tu m’as attiré dans le noir, dans les allées sans arbres, au loin la fête. Alors, j’ai commencé à avoir peur. Sans raison apparente, une peur livide et interdite, sans saveur particulière. Cela sentait le fer. Ma salive était amère. Tu ne disais rien. Ton contact était moite. Ma tête tournait, je faisais un peu le fier, il ne fallait pas laisser affleurer la moindre faiblesse.

Ne me touche pas

Ne me laisse pas revenir

Pars

Ne prends rien

C’est interdit !

 

Nous étions allongés. Je ne réfléchissais que peu, en fait, j’aurais aimé m’endormir, simplement. Nous ne parlions plus. La lune devait donner quelques lueurs, tu caressais mon bras, tu parcourais les veines le long de mes poignets et mes mains, avec une douceur méthodique, je ne ressentais pas la sensualité que l’on s’attend à recevoir dans ce genre de situations…

Je ne te touchais pas, je n’en avais pas envie, je restais en moi, calme et attentif.

Tu as léché cette veine qui serpente le long de mes tempes quand je suis sous pression. Lentement. Tu ne disais rien, je ne voyais pas assez ton visage pour saisir la moindre expression. Tu as ôté ta chemise, tes seins perlaient à la lumière du soir, c’était troublant, beau et intemporel. Je voulais les effleurer mais je n’ai rien fait. Tu parcourais de ta langue cette veine palpitante.

 

Le picotement, je ne voyais pas, je ne pouvais y croire.

La piqûre, en fait, lente.

L’écoulement.

 

Une fois encore, je serais resté là avec toi des heures. Tu étais nue, belle et chasseresse. J’étais offert, nu également, je ne me souviens pas d’avoir pourtant fait quoiqu’il fut pour me retrouver si honteusement nu. La nuit aidait à minimiser l’éclat des faits. Que faisions-nous ? J’aurais dû te poser la question mais je ne parle jamais trop alors là encore moins.

Les étoiles et la rosée, je suivais les tribus étrangères dans le ciel, je te laissais parcourir mon corps, je ne comprenais rien, je ne suis pas bien attirant, pourquoi cette fascination ?

Tu semblais rechercher quelque chose à travers moi, au-delà, et cela devait me rassurer.

Nous avons marché dans le lit d’une petite rivière, le sable doux permettait de garder les pieds nus, nous allions lentement. Je te suivrai…

 

Dans le bassin, le clapotis des gouttes d’eau.

Tu embrasses le creux de mon cou puis l’intérieur de mes cuisses

Tu es si excitée…

 

Nous étions l’un à l’autre, enlacés dans ce petit bassin, loin des bruits habituels, quelques feuilles, l’eau et les animaux nocturnes…

Et c’est arrivé…

 

Je n’avais pas assez d’expérience, je n’ai pas su que ce n’était pas cela mais j’ai ouvert les yeux dans le fond des eaux, j’ai trouvé le passage et j’ai senti que je perdrais connaissance.

Tu parcourais ma chevelure épaisse, tu descendais à mes joues et ma bouche, je ne répondais jamais, pas possible. Arrivée dans le cou, tu as fait pression, j’ai senti ce baiser tendre et profond, j’ai senti aussi cette pression inouïe accompagnée du sol qui se dérobe, tout se met à tourner, je me suis agrippé à toi, soudain, j’ai frémi, j’ai voulu crier, trop tard, tu m’as lentement plongé plus profond dans l’eau.

 

Le sang coule mais il vient à toi, tu l’aspires.

Tu seras alors dans le bain, l’eau se teinte.

Tu laisses tes lèvres s’abreuver.

Je tremble,

je soupire,

je suis bien,

abandon.

Tu me plonges la tête sous l’eau, avec douceur et insistance, tu l’attires à toi et je mords ton sein, je le mords avec envie, avec un désir qui n’a plus rien d’habituel, dans la honte et dans le sang, je déchire.

 

Mange

Déchire

Aspire

Recrache

Avale

Désosse

 

Tue

Cannibale

Moi

Animal

Toi

Ton nom dans les lettres écarlates

Scarlett

Tu es mienne

Que je te déchiquète

Qui sera le premier

De toi à moi le dernier

Nous serons les amants du sang de la chair des os récurés

Donne-moi ton sang,

Offre ta chair

Tu ne seras plus jamais gros

Tu n’auras plus jamais froid,

Je suis vraiment à toi,

Cœur et sang

Eau et peau

Crépitements.

 

Ecoute le chant des grenouilles, reprends vie, pose mousse et vase sur la plaie de ce sein meurtri

Je panse les morsures, fémorales et carotides, tu as mon goût mon amour…

Sang est beau, limpide et épais, foncé et grisant.

 

Ne dis rien, j’ai compris, dans le nom de la nuit.

 

 

 

 

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