Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Poussières...

Publié le par Mathias LEH

Poussières...

« Prenez mon joug sur vous et apprenez de moi, car je suis débonnaire et humble de cœur ; et vous trouverez le repos de vos âmes » Matthieu 11. 29

Je marchais sur les chemins de poussière. Maintes fois je me suis senti perdu. Je ne savais pas, je voulais toujours y croire. Vous n’avez rien fait, on vous a donné de l’amour au nom des traditions, on vous a fait crédit de beaux sentiments mais je n’y crois absolument plus.

Je suis le premier des enfants du deuxième.

Je suis le premier et porte en ce nom les traces de ce qu’il fut, de cet étrange sentiment qui fut le sien et contre lequel il lutta toute sa vie durant. Je suis l’héritier et de lui je porte le nom et les souvenirs, il vient au creux de moi chaque soir comme une aile au creux de mes pensées. Je l’aime pour et contre ce qu’il fut pour moi. Mon père.

Je ne puis prendre le chemin du pardon avec vous, je n’y parviens pas, pour maintenant, il vous faudra entrer dans la terre moisie des souvenirs anciens, il vous faudra faire oublier tous ces affronts à ce qu’une famille se devait d’être.

Je remplis ces lignes comme celles des paperasses qui sont le signe de votre départ irrémédiable. Je viens en partie de vous, en partie d’autres, je suis dans les racines, du mal avant tout, pas d’horreur, ce serait trop vous faire honneur, les champs ne sont que ruines, vous n’avez jamais su labourer la moindre once de terre humaine, vous n’avez parcouru que vos demeures d’égoïsme. Vous étiez bel et bien unis, personne n’a pu y croire, votre union dans l’égoïsme, rien de plus, rien de moins. Chacun enfermé en son monde, je me sens si craintif de vous ressembler, je ne veux laisser tomber. Oui, je ne vous aime pas vraiment, de l’affection affleure quelquefois mais elle n’est rien en regard du dégout bien plus profond, de ce gâchis auquel vous vous êtes orchestré l’un l’autre. Ne jamais rien finalement faire que par rapport à soi, le don de soi amputé totalement.

Ils sont morts, la poussière retourne à la poussière et je ne trouve que la colère…

Je ne retrouve le temps des délicatesses qu’ils décrivent dans les livres, je ne trouve pas la voie de la douceur. A-t-elle jamais existée ?

Dans cette famille était-on réellement capable de douceur ?

Rester en dehors, vouloir y croire, s’exiler au loin, être dans les confins. Rien n’y fait…

Reste avec moi, suis le sentier, la sueur qui perle dans chaque lettre de mon nom. Une fois encore, toujours. Je viens de là, ce n’est pas un secret, je n’en fais pas mystère. Il y a là une forme de bâtardise quelque part, et que ceux qui ne comprennent pas ne pardonne vaguement… Mon père tenait ce sentiment de gâchis, mon oncle probablement aussi, j’ai cru être étranger à tout cela et soudain, dans les vagues caraïbes, sondant ce curieux mépris qui va de vous à moi. Dans le torrent des questions, je me pose des questions, les anciennes phrases s’insinuent, le vieux serpent de mer.

Que m’avez-vous donné ? Que reste-t-il à présent ?

Cette ambiguïté terrible envers la Roumanie, dont je ne me sens pas, dont je ne sais pas. Cette langue que mon père lui-même ne parlait pas. Il ne parlait la langue de sa mère. Mon oncle oui, il était le seul à pouvoir entrer en ce territoire. Je suis resté sur les bords. Vous avez pulvérisé ce qui aurait pu faire sens et ordre. On ne parlait pas la même langue et le mensonge tapissait chaque parcelle du réel. Je ne parviens pas à imaginer ce qu’a pu être la vie avec vous, quand ils étaient enfants. On faisait semblant, le plus souvent. On parlait deux langues et aucune vraiment. C’était quoi être roumain pour vous ?

Elle n’est jamais retournée dans son pays, elle n’exprimait pas de nostalgie, elle en parlait comme de tout le reste, dans un élan de théâtralisation faussement distant.

De vous, au final, je ne sais que peu de choses et mon imagination, jamais en reste, fait le reste…

Vous êtes morts, consumés, éloignés, perdus, envolés.

Avez-vous jamais finalement été là ?

J’ai parfois cette horrible impression : nous n’avons fait que construire votre gentillesse, votre intérêt, sauver les apparences.

Tout reste à jamais question d’angle de vue, forcément ! Dans cette lecture critique au vitriol, je vous vois si caricaturalement simples, elle folle et prête à tout pour aller dans le faste et à la pêche à l’argent, seul but. Lui petit, égoïste et victime avant tout de lui-même, absent au monde et aux autres, sa famille comme le reste. Volés, spoliés d’eux-mêmes. Ils se tenaient de haine et de coups bas dans les courants contraires. Lui fuyant dans le travail et l’oubli, elle préparant sans cesse une nouvelle potentielle façon d’être riche et célèbre. Un mauvais feuilleton, une novela roumano française de bas étage !

De la haine et du rejet faire mon lit ? Je ne pense pas, il reste tant à faire et l’humilité doit se frayer un chemin, qui saura quel grand-père je serai un jour ? Que laisserai-je donc en héritage ?

D’où tient cette colère ?

Commenter cet article